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« C’est simple. Tu rentres et tu fais ce qu’on a dit hier. » Je lui souris. Il m’avait dit ça comme si je n’étais pas capable de le faire. Je suis capable de tout. Je n’ai peur de rien et c’est ce que je vais lui démontrer. Ce n’est pas un petit défi comme ça qui va me faire peur bien au contraire. Je rentrais dans l’amphithéâtre. J’étais déçue, il n’y avait pas autant de monde que je l’imaginais. Mais bon, les personnes présentes me dévisageaient, se demandant sans doute ce que je faisais ici. Je n’avais pas pu m’empêcher de sourire. J’avais choisi une place au hasard. De toute façon la place que je devais choisir n’avait pas trop d’importance, tant qu’il y avait quelqu’un à côté de moi et que je pouvais lui parler, c’était bon. J’avais sorti un crayon et cahier, alors que tous les autres dans l’amphithéâtre avaient leurs ordinateurs. La salle commençait à se remplir petit à petit, puis le professeur est arrivé. Le jeu pouvait commencer. Mon cahier était ouvert, je commençais à dessiner, cela donnait l’impression que je suivais le cours et que je prenais des notes. Je me tournais vers mon voisin. Il avait l’air très concentré sur le cours. Tant mieux. « Tu dois certainement te demander ce que je fais ici. Ou pas d’ailleurs. Et puis ça n’a pas d’importance après tout. Je sais juste que tu sais que je ne dois pas être ici. Après tout je ne suis qu’en première année et je ne suis même pas dans le bâtiment où je dois être. » Je souris. Il avait l’air déboussolé. C’était encore mieux que ce que j’imaginais. « En fait, j’ai perdu à un pari et un ami a parié que je ne serais pas capable d’entrer dans un amphithéâtre au hasard, de choisir une place au hasard et de raconter ma vie à la personne qui est assise à côté de moi. » Je marquais une pause tout en continuant le dessin, où plutôt le gribouillis, que je faisais sur cahier. « Je suis désolée pour toi, mais cette personne qui va être obligée de supporter ce que je vais dire ça va être toi. » Je lui souris. Il avait l'air surpris, mais je m'en fichais. Je continuais mon monologue qui allait durer une longue heure. « Je suis née à Melbourne en Australie. Mes parents sont tous les deux instituteurs. Ils se sont rencontrés à leur travail d'ailleurs. C'était un coup de foudre d'après ce qu'ils m'ont raconté. Et un an plus tard ils se sont mariés. Je suis la dernière de la famille. Avec mes parents, on est sept ans en tout dans la famille. J'ai quatre frères et sœurs. Il y a d'abord Zelda, elle a vingt-sept ans et habite toujours en Australie. En fait toute ma famille habite encore en Australie. Bref, ensuite il y a les jumeaux Harry et Jay. Ils ont vingt-quatre. Puis il y a Maya, mon autre sœur qui a vingt-deux ans. » Je m'arrêtais de parler un peu. C'est que de parler autant est assez fatiguant. Mon voisin continuait de prendre comme s'il n'écoutait pas ce que je disais. En même temps pas vie n'était pas très intéressante, plutôt banal. Cela ne m'étonne pas qu'il préfère rester concentré sur son cours plutôt que d'écouter ma vie qui était plus que passionnante. Mais je continuais quand même de lui parler. « Je n'ai pas vraiment une vie passionnante. J'ai même une vie tout à fait ordinaire. Je suis une fille banale qui a découvert que le Père Noël n'existait, car elle avait vu son père déposer les cadeaux au pied du sapin le matin de Noël. Je n'étais pas vraiment la fille populaire au collège et au lycée. Je vivais ma vie tranquillement. Je ne sais pas qu'est-ce-que je pourrais te raconter d'autre ... » Je soupirais. Il fallait vraiment que je trouve quelque chose à raconter, le cours n'était pas fini et je devais lui parler durant tout ce cours. « Ah, les problèmes de coeur. Durant toute ma petite vie, je n'ai pas eu de chance avec les garçons. Je ne tombe pas facilement amoureuse, mais que je tombe amoureuse, il faut que ça soit un idiot fini qui me trompe dès qu'il en a l'occasion. Les garçons sont vraiment tous des idiots, et je retiens mes mots. » Je me tournais vers mon voisin. Il avait arrêté d'écrire. Peut-être qu'il était en train de m'écouter. Ou peut-être que j'étais en train de l'énerver. « Enfin, toi tu es peut-être l'exception qui confirme la règle. » Oui, j'essayais tant bien que mal de me rattraper. « Mais bon, je ne prends plus la tête avec ça maintenant. Je ne m'engagerais dans une relation sérieuse quand je saurais que c'est le bon. Enfin je ne suis pas non plus une fille facile. Je ne couche pas avec n'importe quel garçon. En plus je n'aime pas être traitée comme un objet, si un gars veut coucher avec moi le temps d'un soir, c'est non. » Je regardais de nouveau mon voisin. Il avait l'air de nouveau rien à faire de ce que je disais. En fait, peut-être que si je lui avais dit que oui je couchais avec n'importe qui, n'importe quand et n'importe où, il m'aurait souri et donner son numéro de téléphone. Mais je ne suis pas comme ça, j'ai des principes quand même.« Tu dois certainement te demander, ou pas d'ailleurs, qu'est ce qu'une petite Australienne vient faire ici à Jacksonville. » Je marquais une pause et souriait. « En fait j'ai tué quelqu'un et je suis en fuite. On me recherche partout en Australie alors je me suis dit que la Floride pouvait pas être si mal. Que ça serait sympa. » Je regardais mon voisin. Il avait lâché son crayon, comme s'il avait était surpris. Au moins ça signifiait qu'il était en train de m'écouter. « Je rigole, je n'ai tué personne. C'est juste que je me disputais souvent avec mes parents alors ils ont peut-être pensé que prendre un petit de distance, calmerait tout ça. Et j'ai un peu de familles ici, donc ils me surveillent en quelques sortes. »Le cours devait être terminé puisque tous les autres étudiants étaient en train de ranger leurs affaires. Tant mieux, puisque je ne savais plus quoi lui raconter. Je rangeais aussi mon stylo et mon carnet dans mon sac. « Merci de m’avoir écouté durant tout le cours. Au fait je m’appelle Primrose. » Je lui adressais un dernier sourire avant de partir de cet amphithéâtre. Le garçon qui m’avait lancé ce défi était dehors avec une bouteille d’eau à la main. Bouteille d’eau que je lui arrachais des mains bien évidemment. C’est que de parler autant donne soif. « Tu l’as réellement fait ? » Il me regardait comme si je n’étais pas capable. « Je devais juste raconter ma vie à un inconnu durant un cours. C’est comme si je parlais à un psy sauf qu’il en à faire de ce que je dis et que je l’emmerde plus qu’autre chose. Mais c’était marrant. Il faudrait que je refasse ça un jour. »